Asociación para el estudio de temas grupales, psicosociales e institucionales

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Formation et transmission. Expériences personnelles. Th. von Salis


Formation et transmission. Expériences personnelles

Thomas von Salis 


En février 1992 on a organisé, à Zürich, un post-congrès du C I R, donc de l’organisation qui venait d’être dissoute à l’occasion du congrès de Rimini. C’était une occasion pour les collègues latino-américains, espagnols, italiens et suisses de faire connaissance et d’échanger leurs pensées scientifiques. Une journaliste psychanalyste en a publié un compte-rendu dans la Neue Zürcher Zeitung.

Depuis, on a été lent à Zürich, et on l’est toujours, à se donner une organisation pour s’occuper des groupes opératifs. Une telle organisation concerne surtout ceux qui utilisent le concept opératif dans leur pratique professionnelle et dans leur pensée.
Ce n’est qu’au mois de janvier de cette année 2006, que l’organisation AGOG (Arbeitsgemeinschaft Operative Gruppen) a enfin voté et entériné un règlement de formation pour les futurs coordinateurs de groupes opératifs.

Jusqu’alors, la formation se faisait dans le cadre d’un contrat privé entre l’équipe et les membres du groupe en formation. L’organisation AGOG qui est une association comme un club de chanteurs ou de joueurs de tennis, s’était prononcée favorable à ce que les équipes qui avaient été engagées par les groupes de formation prennent la responsabilité de former des coordinateurs de groupes. C’est cette même pratique qui est maintenant réglementée par écrit. Il existe une liste de noms de ceux qui ont fait la formation et ceux qui sont autorisés à superviser des travaux avec des groupes opératifs et servir comme équipes pour des groupes de formation. De ces groupes de formation ressortent les nouveaux membres de l’AGOG.

On suppose en principe que les membres de l’AGOG ont une pratique qui est basée sur les concepts opératifs de groupe. Mais pas tous ne travaillent à proprement parler avec des groupes. Soit qu’ils ont une pratique psychanalytique essentiellement pour des cas de traitement individuel, ou bien un travail dans une institution dans laquelle ils n’ont pas l’autorisation ou le courage qu’il faut pour appliquer la technique opérative, ils n’ont pas la possibilité de faire des expériences avec la technique opérative de groupe. Ceci a pour résultat que le nombre de personnes qui appliquent et développent réellement la technique opérative reste relativement restreint.

Ce qui se fait au plus près du modèle « idéal » du groupe opératif, c’est la formation des futurs coordinateurs de groupe et par cela même des futurs membres de l’AGOG. C’est ainsi que se reproduit une situation analogue à celle des psychanalystes de l’IPA. Le setting analytique « idéal » ne s’applique plus guère sauf pour les candidats. Dans la pratique de tous les jours, les analystes font des psychothérapies psychanalytiques remboursées par les caisses d’assurance maladie (c’est au moins le cas pour la Suisse et l’Allemagne) avec une fréquence de séances entre une et trois heures par semaine. Une rationalisation est fournie par les nouvelles nosologies qui justifient des variations du setting analytique par la psychopathologie du patient selon DSM IV ou ICD 10 (CIM 10 en français). (A mon avis il y  a une bonne portion de pensée magique dans la croyance que la psychothérapie se puisse faire techniquement adapté aux troubles manifestes).

Cette situation a comme conséquence un souci partagé par un grand nombre de collègues que la « bonne pratique » ne se perde par les adaptations opportunistes, ce qui aurait comme conséquence ultérieure le dépérissement du paradigme analytique et opératif du groupe.  

On peut, dans le cas de Zürich, parler d’une tradition centenaire de l’adaptation opportuniste du paradigme psychanalytique. L’école Jungienne est l’exemple le plus connu. Dans les années soixante le petit groupe de membres de l’IPA à Zürich a connu un accroissement considérable qui a duré jusqu’en 1976, le moment de la rupture qui a exclu le séminaire psychanalytique de la Société psychanalytique suisse. Cette dernière avait refusé de maintenir dans ses rangs un séminaire avec des tendances vers l’autogestion.
Dans les années qui suivaient le congrès de l’IPA à Rome en 1969, le séminaire de Zürich avait une fraction qui était la « plateforme ». On a essayé, dans les réunions régulières de la plateforme, d’étudier la relation entre marxisme et psychanalyse. C’était lors de ces réunions que se faisait sentir le besoin d’une meilleure coordination, et puisque à Rome il y a eu la rencontre des Zurichois avec les Argentins dans le cadre de la contestation qui se manifestait dans le contre congrès, on connaissait Armando Bauleo et au bout des efforts surtout de Regula Schiess et Elisabeth von Salis il y a eu, en 1980, la constitution d’un premier groupe d’apprentissage avec Armando.

Avec l’introduction des formations de groupe par Armando Bauleo et en même temps par les Foulkesiens, une nouvelle séparation entre psychanalystes du séminaire de Zürich s’est produite. Cette séparation était silencieuse, jusqu’au moment où une discussion publiée dans le « journal » du séminaire psychanalytique de Zürich, en 2005, a soulevé la question, pourquoi les groupistes ne faisaient pas leur formation dans le cadre du séminaire. On a pu préciser à ce moment que les formations de groupe se faisaient en analogie avec la formation psychanalytique par voie de contrat privé entre le groupe et l’équipe des coordinateurs, comme c’est le cas pour le contrat entre analyste et candidat. Tout récemment, il y a une tentative dans le séminaire de faire appel au grupo operativo pour intervenir dans la formation postgraduée des psychothérapeutes psychanalytiques à la suite de la réglementation officielle de cette dernière.

Ce n’est que sous la menace de ne plus reconnaître les thérapies psychanalytiques de longue durée que les écoles et les fractions se réunissent pour le combat politique pour sauvegarder la psychothérapie dite de profondeur (Tiefenpsychologie).

C’est donc la situation de la menace d’extinction qui contraint les collègues de sortir de leurs chapelles pour se réunir dans le but de trouver une stratégie commune pour transmettre leurs idées et pratiques dans une société obsédée par l’idée du manque de ressources économiques.

Les dispositifs analytiques, telles que la psychanalyse proprement dite, la psychothérapie individuelle, l’analyse de groupe, grupo operativo,  - et l’analyse institutionnelle, -  peuvent servir aussi bien comme une défense contre l’autoanalyse que comme un complément de celle-ci.
L’abus fait par l’individu des sociétés de toutes sortes et des groupes sous forme de l’ agir de son transfert par des jeux de pouvoir dans la collectivité, témoigne du manque ou de la défaillance de l’autoanalyse et plus précisément, de la défense contre celle-ci.

Comment penser cela dans les termes et dans le concept opératifs ?
On va se demander comment le groupe interne, latent, se manifeste dans le groupe manifeste actuel, et quel jeu interactionnel est responsable de la production d’un effet « manque d’autoanalyse », effet qui peut se manifester par une méconnaissance de la situation groupale et institutionnelle dans laquelle on se trouve. Cette situation peut être celle du setting groupal opératif, dont le cadre permet d’interpréter les facteurs latents, ou bien une autre situation, comme celle d’une séance d’un conseil exécutif ou une assemblée générale d’une société, où il n’est pas possible d’interpréter.

Il serait intéressant alors de voir quelle est la situation de la supervision comme par exemple d’une équipe de soins dans un hôpital psychiatrique ou dans un foyer d’éducation ou encore dans une école.
Les expériences dont j’ai connaissance, montrent que le setting opératif produit des effets d’éclatement des hiérarchies. Ceci conduit à des réactions souvent violentes de la part des personnes qui maintiennent une position de pouvoir dans l’hiérarchie formelle de l’institution où cette supervision a lieu. Cette réaction peut se manifester comme sabotage qui manifestement se produit dans le groupe supervisé ou bien par des entrées forcées de personnes qui n’appartiennent pas au groupe mais qui exercent une fonction de médecin ou soignant cadre, donc des émissaires de la direction de l’institution. 
Marie Langer, Janine Puget et Eduardo Teper ont publié, en 1964 dans le International Journal of Psycho-Analysis, un article sur leur expérience et expérimentation dans l’Association Argentine de Psychanalyse dans le domaine de la formation et transmission de la  psychanalyse. 
Je prends une phrase hors contexte et je la traduis: «Le fait que l’enseignant de la psychanalyse doit être psychanalyste lui-même ne l’habilite pas automatiquement pour la tâche de l’enseignement, puisque enseigner et soigner sont deux vocations qui n’ont en commun qu’un nombre restreint d’éléments. »
Le concept opératif de groupe connaît la convergence des trois facteurs : apprentissage, cure et recherche dans un seul processus. Le résultat du processus serait la formation, la guérison et la connaissance. On sait que cette triade était déjà un postulat freudien. Dans le travail de Langer et coll. on procède à une séparation de l’apprentissage de la cure. Je suppose que c’est le fruit de la longue expérience du travail dans l’institution de formation psychanalytique qui a contribué à cette mise en relief. Le fait que les auteurs de cet article n’insistent pas sur la recherche comme processus intégré dans la cure analytique et dans la formation, pourrait avoir affaire à une différentiation plus poussée de ce qui est « Recherche » dans le sens  « académique », donc sanctionné par l’institution universitaire, et « recherche » dans le sens que Freud évoque dans le cas du Petit Jean (Juanito) quand il parle du « petit chercheur » qui s’embarque dans l’aventure de la conquête d’un savoir sur la sexualité.
Dans le concept opératif du groupe, la « recherche » est située plus près de Juanito que de l’Alma Mater universitaire. Il s’agit, dans le groupe, d’une recherche avant l’institutionnalisation, d’une quête de sens dans la verticalité de l’histoire individuelle au croisement avec l’horizontalité du moment groupal présent. L’équipe de coordination du groupe a la tâche d’interpréter la latence groupale. Est-ce que la compétence qui autorise les coordinateurs/observateurs doit tirer la légitimité d’une formation psychanalytique, ou s’agit-il, dans le cas de la coordination de groupes, d’une profession différente ? Faut-il donc demander aux coordinateurs de groupe une formation psychanalytique complète ?

Le débat déclenché à Zürich à l’occasion de la réglementation de la formation des coordinateurs de groupes opératifs se centre sur cette question.
Au cours des années, certaines réunions de l’AGOG ont connu le dispositif de groupes coordonnés pour élaborer des thèmes divers. Une opposition contre cette procédure s’est manifestée, en portant en avant l’argument qu’il était indésirable que dans un tel groupe il y avait des formateurs et des candidats en formation dans le même rôle de membre de groupe.
M. Langer et coll. observent (dans l’article cité) que l’on craignait dans le groupe des analystes que la communication facilitée avec le monde externe ne mette en danger le patrimoine analytique en l’exposant à l’influence d’autres disciplines qui pourraient l’absorber ou le contaminer (p. 569). Il est intéressant de remarquer que, à l’époque de ces réunions de l’AGOG, il y avait des sociologues au comité de direction.
Langer et coll. discutent la question des avantages respectifs de groupes d’étudiants mélangés ou homogènes en ce qui concerne leurs préférences idéologiques. Les auteurs constatent qu’un inconvénient du groupe homogène était que le candidat était moins à même d’élargir et approfondir son savoir en intégrant de nouveaux éléments dans sa connaissance théorique, et qu’il était plus difficile de développer un moi critique capable de reconnaître et d’apprendre ce qui est neuf. En plus, l’homogénéité faisait obstacle à la capacité de compréhension et de communication entre les groupes ainsi qu’à leur indépendance.

Je ne peux pas rendre compte de tout le travail décrit dans l’article cité. Qu’il suffise de remarquer que l’expérience rapportée a été faite par des groupes d’étudiants avancés qui ont bénéficié d’équipes d’enseignants mixtes, membres de l’APA et candidats. Ils ont travaillé (enseigné) la théorie de la technique sur la base d’auteurs différents comme Racker, Menninger, Kris, Loewenstein, Klein et Hartmann.
Dans leurs conclusions, les auteurs recommandent qu’une grande attention doit être portée aux contradictions entre les étudiants, aux stéréotypes, aux tensions extrêmes, aux transferts, aux agissements transférentiels, à la dépendance des candidats et à d’autres facteurs interpersonnels. Si on ne travaille pas adéquatement ces difficultés, elles finiront par troubler le processus d’apprentissage et renforceront les défenses.
Il me semble intéressant de noter qu’au congrès de l’IPA au Brésil, l’année dernière , un panel s’est réalisé sur les mêmes questions – auquel Janine Puget a participé comme superviseur (elle avait signé comme co-auteur l’article de 1964, rapporté plus haut). L’investigateur principal du travail rapporté dans ce panel, Andrea R.Q. de Pereira, dit dans la discussion que la recherche sur les opinions et les pensées des candidats est quelque chose de nouveau, alors que l’attribution des opinions des candidats sur leur formation aux facteurs inconscients, régressifs, avait déjà été investiguée. – Cette remarque, comme d’autres faites par les participants au panel, montre que l’histoire semble se répéter ou s’arrêter. Il y a du stéréotypé quand il s’agit de la formation et transmission de ce que nous nommons « analyse ». L’ironie contenue dans le titre du panel – je traduis : « Est-ce que les différences culturelles influencent la formation ou est-ce que tous les analystes, à travers les cultures, ont été formés da la même manière ? » - est peut-être une ironie involontaire. Mais naïve comme elle apparaît, cette question pointe le stéréotype que nous essayons de surmonter par nos efforts en appliquant des dispositifs qui permettent l’interprétation de la latence groupale, institutionnelle et individuelle.

Adresse de l’auteur :
Dr.med. Thomas von Salis
Facharzt für Kinder- und Jugendpsychiatrie
und Psychotherapie
Postfach 51, CH-8702 Zollikon-Station, Schweiz


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